Commentaire composé La corruption du principe de la démocratie de “De l'esprit des lois”

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Résumé du commentaire composé
Commentaire composé sur \"La corruption du principe de la démocratie\" de Montesquieu (L'esprit des lois : Livre VIII). Cette analyse sur La corruption du principe de la démocratie de Montesquieu a été rédigée par un professeur de français.
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Extrait du résumé
Extrait du commentaire composé du livre
“De l'esprit des lois”Après avoir présenté la nature et les principes des trois types de
gouvernements (républicain, monarchique et despotique), Montesquieu se
propose d'étudier dans cet essai argumentatif et rationnel, les principes
qui les corrompent. Cet extrait concerne ceux de la démocratie.Texte étudié : Montesquieu, L'esprit des Lois, Livre VIII, Chapitre 2, La corruption du principe de la démocratie
Le principe de la démocratie se corrompt, non seulement lorsqu'on perd
l'esprit d'égalité, mais encore quand on prend l'esprit d'égalité extrême, et
que chacun veut être égal à ceux qu'il choisit pour lui commander. Pour
lors le peuple, ne pouvant souffrir le pouvoir même qu'il confie, veut tout
faire par lui-même, délibérer pour le sénat, exécuter pour les magistrats,
et dépouiller tous les juges.
Il ne peut plus y avoir de vertu dans la république. Le peuple veut faire les
fonctions des magistrats: on ne les respecte donc plus. Les délibérations
du sénat n'ont plus de poids; on n'a donc plus d'égards pour les
sénateurs, et par conséquent pour les vieillards. Que si l'on n'a pas du
respect pour les vieillards, on n'en aura pas non plus pour les pères; les
maris ne méritent pas plus de déférence, ni les maîtres plus de
soumission. Tout le monde parviendra à aimer ce libertinage: la gêne du
commandement fatiguera comme celle de l'obéissance. Les femmes, les
enfants, les esclaves n'auront de soumission pour personne. Il n'y aura
plus de moeurs, plus d'amour de l'ordre, enfin plus de vertu.
On voit, dans le Banquet de Xénophon, une peinture bien naïve d'une
république où le peuple a abusé de l'égalité. Chaque convive donne à son
tour la raison pourquoi il est content de lui. « je suis content de moi, dit
Charmides, à cause de ma pauvreté. Quand j'étais riche, j'étais obligé de
faire ma cour aux calomniateurs, sachant bien que j'étais plus en état de
recevoir du mal d'eux que de leur en faire; la république me demandait
toujours quelque nouvelle somme; je ne pouvais m'absenter. Depuis que
je suis pauvre, j'ai acquis de l'autorité; personne ne me menace, je
menace les autres; je puis m'en aller ou rester. Déjà les riches se lèvent
de leurs places, et me cèdent le pas. Je suis un roi, j'étais esclave; je
payais un tribut à la république, aujourd'hui elle me nourrit; je ne crains
plus de perdre, j'espère d'acquérir. »
Le peuple tombe dans ce malheur, lorsque ceux à qui il se confie, voulant
cacher leur propre corruption, cherchent à le corrompre. Pour qu'il ne voie
pas leur ambition, ils ne lui parlent que de sa grandeur; pour qu'il
n'aperçoive pas leur avarice, ils flattent sans cesse la sienne.
La corruption augmentera pan-ni les corrupteurs, et elle augmentera
parmi ceux qui sont déjà corrompus. Le peuple se distribuera tous les
deniers publics; et, comme il aura joint à sa paresse la gestion des
affaires, il voudra joindre à sa pauvreté les amusements du luxe, Mais,
avec sa paresse et son luxe, il n'y aura que le trésor public qui puisse être
un objet pour lui.
Il ne faudra pas s'étonner si l'on voit les suffrages se donner pour de
l'argent. On ne peut donner beaucoup au peuple, sans retirer encore plus
de lui; mais, pour retirer de lui, il faut renverser l'État. Plus il paraîtra tirer
d'avantage de sa liberté, plus il s'approchera du moment où il doit la
perdre. Il se forme de petits tyrans qui ont tous les vices d'un seul.
Bientôt ce qui reste de liberté devient insupportable; un seul tyran
s'élève; et le peuple perd tout, jusqu'aux avantages de sa corruption.
La démocratie a donc deux excès à éviter: l'esprit d'inégalité, qui la mène
à l'aristocratie, ou au gouvernement d'un seul; et l'esprit d'égalité
extrême, qui la conduit au despotisme d'un seul, comme le despotisme
d'un seul finit par la conquête.
Il est vrai que ceux qui cor-rompirent les républiques grecques ne
devinrent pas toujours tyrans. C'est qu'ils s'étaient plus attachés à
l'éloquence qu'à l'art militaire : outre qu'il y avait dans le coeur de tous les
Grecs une haine implacable contre ceux qui renversaient le gouvernement
républicain; ce qui fit que l'anarchie dégénéra en anéantissement, au lieu
de se changer en tyrannie.
Mais Syracuse, qui se trouva placée au milieu d'un grand nombre de
petites oligarchies changées en tyrannies ; Syracuse, qui avait un sénat
dont il n'est presque jamais fait mention dans l'histoire, essuya des
malheurs que la corruption ordinaire ne donne pas. Cette ville, toujours
dans la licence ou dans l'oppression, également travaillée par sa liberté et
par sa servitude, recevant toujours l'une et l'autre comme une tempête,
et malgré sa puissance au-dehors, toujours déterminée à une révolution
par la plus petite force étrangère, avait dans son sein un peuple immense,
qui n'eut jamais que cette cruelle alternative de se donner un tyran, ou de
l'être lui-même.
(Montesquieu, L'esprit des Lois, Livre VIII, Chapitre 2, La corruption du principe de la démocratie)