Commentaire composé En banlieue de “Voyage au bout de la nuit”

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Résumé du commentaire composé
Commentaire composé sur En banlieue, extrait de \"Voyage au bout de la nuit\" de Céline. Cette analyse sur \"En banlieue\" de Marguerite Duras (Voyage au bout de la nuit) a été rédigée par un professeur de français.
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Extrait du résumé
Extrait du commentaire composé du livre
“Voyage au bout de la nuit”Dans Voyage au bout de la nuit, de malheur en déchéance, le héros fait découvrir le monde aux lecteurs, avec une ironie et un cynisme grinçants. Le roman est écrit à la première personne, dans une langue volontairement crue et familière.
Arrivé au terme géorgraphique du voyage, Bardamu (le héros) est immergé dans l'univers sordide de la banlieue. Les transports sont décrits ici comme un raccourci à la fois réaliste et mythique de la vie des blanlieues.
Texte étudié : Voyage au bout de la nuit, \"En banlieue, Céline
En banlieue, c'est surtout par les tramways que la vie vous arrive le
matin. Il en passait des pleins paquets avec des pleines bordées d'ahuris
brinquebalant, dès le petit jour, par le boulevard Minotaure, qui
descendaient vers le boulot. Les jeunes semblaient même comme
contents de s'y rendre au boulot. Ils accéléraient le trafic, se
cramponnaient aux marchepieds, ces mignons, en rigolant. Faut voir ça.
Mais quand on connaît depuis vingt ans la cabine téléphonique du bistrot,
par exemple, si sale qu'on la prend toujours pour les chiottes, l'envie vous
passe de plaisanter avec les choses sérieuses et avec Rancy en particulier.
On se rend alors compte où qu'on vous a mis. Les maisons vous possèdent,
toutes pisseuses qu'elles sont, plates façades, leur coeur est au
propriétaire. Lui on le voit jamais. Il n'oserait pas se montrer. I1 envoie
son gérant, la vache. On dit pourtant dans le quartier qu'il est bien
aimable le proprio quand on le rencontre. Ça n'engage à rien.
La lumière du ciel à Rancy, c'est la même qu'à Détroit, du jus de
fumée qui trempe la plaine depuis Levallois. Un rebut de bâtisses tenues
par des gadoues noires au sol. Les cheminées, des petites et des hautes,
ça fait pareil de loin qu'au bord de la mer les gros piquets dans la vase. Là
dedans, c'est nous.
Faut avoir le courage des crabes aussi, à Rancy, surtout quand on
prend de l'âge et qu'on est bien certain d'en sortir jamais plus. Au bout du
tramway voici le pont poisseux qui se lance au-dessus de la Seine, ce gros
égout qui montre tout. Au long des berges, le dimanche et la nuit les gens
grimpent sur les tas pour faire pipi. Les hommes ça les rend méditatifs de
se sentir devant l'eau qui passe. Ils urinent avec un sentiment d'éternité,
comme des marins. Les femmes, ça ne médite jamais. Seine ou pas. Au
matin donc le tramway emporte sa foule se faire comprimer dans le
métro. On dirait à les voir tous s'enfuir de ce côté-là, qu'il leur est arrivé
une catastrophe du côté d'Argenteuil, que c'est leur pays qui brûle. Après
chaque aurore, ça les prend, ils s'accrochent par grappes aux portières,
aux rambardes. Grande déroute. C'est pourtant qu'un patron qu'ils vont
chercher dans Paris, celui qui vous sauve de crever de faim, ils ont
énormément peur de le perdre, les lâches. Il vous la fait transpirer
pourtant sa pitance. On en pue pendant dix ans, vingt ans et davantage.
C'est pas donné.
Et on s'engueule dans le tramway déjà, un bon coup pour se faire la
bouche. Les femmes sont plus râleuses encore que des moutards. Pour un
billet en resquille, elles feraient stopper toute la ligne, c'est vrai qu'il y en
a déjà qui sont saoules parmi les passagères, surtout celles qui
descendent au marché vers Saint-Ouen, les demi-bourgeoises. « Combien
les carottes ? » qu'elles demandent bien avant d'y arriver pour faire voir
qu'elles ont de quoi.
Comprimés comme des ordures qu'on est dans la caisse en fer, on
traverse tout Rancy, et on odore ferme en même temps, surtout quand
c'est l'été. Aux fortifications on se menace, on gueule un dernier coup et
puis on se perd de vue, le métro avale tous et tout, les complets
détrempés, les robes découragées, bas de soie, les métrites et les pieds
sales comme des chaussettes, cols inusables et raides comme des termes,
avortements en cours, glorieux de la guerre, tout ça dégouline par
l'escalier au coaltar et phéniqué et jusqu'au bout noir, avec le billet de
retour qui coûte autant à lui tout seul que deux petits pains.
(Louis-Ferdinand CELINE, Voyage au bout de la nuit (1932), En banlieue)